Alors que l’Amiens SC n’a plus marqué le moindre but depuis plus de cinq heures et remporté qu’un seul de ses onze derniers matches, Omar Daf refuse de remettre en cause son plan de jeu. Persistant plus que jamais au sujet d’un simple manque d’efficacité, l’ancien latéral estime simplement tirer le meilleur de son groupe actuel. Entretien.
Omar Daf, quels leviers pouvez-vous encore activer alors que certains joueurs ont visiblement du mal à ne pas lâcher prise sur cette fin de saison ?
Je ne suis pas d’accord dans le sens où, ce match face à Dunkerque on l’attaque. On a des courses dans la profondeur. En début de rencontre Antoine (Leautey) a pas mal d’opportunités dans la surface, il y a eu des centres, une reprise de la tête de Frank (Boya), il y a Mounir (Chouiar) qui peut marquer au premier poteau ; donc non l’équipe se projette, on s’est battu jusqu’au bout. C’est un match qui était ouvert, qu’on voulait absolument gagner donc ça partait d’un côté comme de l’autre. Cette équipe de Dunkerque a été plus efficace que nous, mais les garçons ne lâchent pas à l’image du match à Concarneau, où – même à neuf – les gars se sont battus jusqu’au bout pour ramener ce point.
Vous parlez souvent du manque d’efficacité de votre équipe, mais c’est sans doute un peu réducteur, il y a aussi un déficit de créativité. Votre jeu apparaît de plus en plus stéréotypé, avec un manque de mouvements, et facile à anticiper pour vos adversaires…
Non, toutes les équipes ont leurs forces et leurs faiblesses, leurs caractéristiques. On sait de quelle manière nos joueurs offensifs évoluent. Comme on connaît aussi les caractéristiques de nos adversaires. Chaque équipe joue avec ses forces. On a des forces qui sont clairement identifiées. On a des axes d’amélioration, où il n’y a pas de surprises à niveau-là, à ce stade de la saison. Maintenant, il y a des équipes mieux classées qui se créent très peu de situations, qui arrivent à être efficaces. Pour moi, le but du jeu est de marquer un but de plus que l’adversaire et gagner. Sur la dernière rencontre, on a des opportunités.
Vous avez donc le sentiment de maximiser les chances de votre équipe de marquer, de l’emporter ? A vos yeux, tout ce qui est fait jusqu’à la phase de finition est satisfaisant ?
Bien sûr. Si l’équipe adversaire n’était pas en danger…
Contre Guingamp et Concarneau les meilleures situations sont en notre faveur. Malheureusement, en tant qu’entraîneur, je ne peux marquer un but à leur place.
Omar Daf, entraîneur de l’Amiens SC.
Sur les derniers matches, vous trouvez vos adversaires vraiment en danger ?
Oui. Il suffit de regarder la première mi-temps de Dunkerque. En première mi-temps, cette équipe est en danger. On a trouvé les décalages, notamment Antoine (Leautey) sur le côté droit. Logiquement, tu dois marquer. Si les ballons n’arrivaient pas dans la surface, il faudrait s’inquiéter mais il n’y a pas un match où on ne se crée pas de situations. Contre Guingamp et Concarneau les meilleures situations sont en notre faveur. Malheureusement, en tant qu’entraîneur, je ne peux marquer un but à leur place. Maintenant, il faut les mettre au fond.
Vous n’avez jamais été un adepte de la possession pour la possession. Néanmoins, en début de saison, il y avait la volonté de presser haut l’adversaire et d’exploser rapidement à la récupération. Or, le bloc équipe est plus bas qu’en début de saison et la hauteur de votre ligne de récupération est également plus basse. Comment l’expliquez-vous ?
Ça s’explique très clairement. Au milieu, il y a des joueurs qui ont marqué le pas, il y a eu des absents par moment. On a été obligé de s’adapter, après avoir commencé avec un schéma (ndlr : 4-2-3-1). Ce schéma a évolué. Si on doit avoir la possession on aura la possession, cela nous pose aucun problème. Il y a des matchs où on l’a eu un eu plus, des matchs où c’était plus compliqué et des matchs où c’était plus équilibré. Il faut être pragmatique dans le jeu. Quel que soit le scénario du match, ce qu’on veut c’est gagner. Après, on joue aussi en fonction des joueurs disponibles. Contre Dunkerque, on a joué d’une certaine manière parce qu’on avait sept voire huit absents. Raison pour laquelle en janvier il y a pas mal de match où on a évolué en 4-4-2, ce qui nous a permis de prendre beaucoup de points. On avance avec la forme du moment, des joueurs disponibles.
Même à 1-0 contre Dunkerque, on n’a pas vraiment vu l’équipe se révolter…
On joue avec les forces du moment. Je pense qu’en mettant (Mohamed) Jaouab dans le couloir, forcément Antoine (Leautey) a moins de soutien alors qu’il a énormément donné en première mi-temps. Ayoub (Amraoui) a d’autres qualités, mais ce ne sont pas des contres-attaquants non plus. Il y a des explications. Les joueurs offensifs peuvent se retrouver dans ces situations-là. On a Frank Boya qui se projette pour soutenir aussi Louis Mafouta, en l’absence de Gaël (Kakuta) dans le coeur du jeu. On ne va pas inventer des choses qu’on a pas.
![Amiens SC Omar Daf](https://i0.wp.com/le11hdf.fr/wp-content/uploads/2024/04/ICONSPORT_209261_0158-scaled.jpg?resize=788%2C525&ssl=1)
Vous allez encore rencontrer deux adversaires qui luttent pour leur survie. A commencer par Quevilly, qui marque beaucoup de but et qui vient de battre Auxerre à domicile…
Je pense que Kalifa Coulibaly leur fait du bien dans le domaine aérien (Sambou) Soumano est intéressant. Ils ont de la qualité sur le plan offensif. C’est aussi une équipe qui avait fait une belle saison l’an dernier (ndlr : l’effectif a été profondément remanié). Ils ont mal démarré mais ça reste une équipe de qualité. Le championnat est homogène et difficile, il faut respecter tous nos adversaires. C’est ce que nous faisons. Les matches sont disputés, à nous de garder notre sérénité, notre calme, de jouer avec nos forces. Il ne faut pas chercher à inventer des choses.
N’est-ce pas un peu le moment de titiller un peu l’orgueil de vos joueurs, qui restent sur plus de cinq heures sans marquer, qui n’ont gagné qu’un match sur onze ?
On est des professionnels, on travaille au quotidien tous les aspects, que ce soit physique, tactique, technique ou mental. Sinon, les joueurs ne seraient pas à ce niveau-là. Le football est beau, difficile. Il y a des moments avec moins de réussite. Il faut faire preuve de caractère et de personnalité. Vous pouvez compter sur moi pour se battre au quotidien et sur le terrain. C’est dans mon ADN, c’est comme ça que je suis formé et que je travaille. Cela ne peut passer que par le travail.
On est très humbles par rapport à nos qualités et à cette division.
Omar Daf, entraîneur de l’Amiens SC.
Que ce soit dans votre ADN c’est bien, mais est-ce réellement dans l’ADN de vos joueurs. Parvenez-vous à leur transmettre ça ?
Il faut rester tranquille. Il faut continuer à travailler dur. On ne lâche pas les joueurs, mais il y a des choses qu’on ne transforme pas du jour au lendemain. La majorité des joueurs étaient là la saison dernière. Il y a des choses sur lesquelles on va travailler pour s’améliorer il y a déjà des choses qui se sont améliorées par rapport à la saison dernière. On va travailler pour que certains aillent encore plus haut.
Sur quoi avez-vous progressé par rapport à la saison dernière ?
Cette équipe est plus solide. Aujourd’hui, on ne voit que le manque d’efficacité offensive. On travaille, on fait beaucoup d’efforts. On est aussi la deuxième défense du championnat. Cette solidité nous permet de continuer à avancer. On a battu les trois premiers, on sait pour quelles raisons. Il y a des bonnes choses et on s’appuie dessus. Sur les cinq matchs qu’il reste, il faut tout donner. C’est pour ça que je dis sur la dernière conférence de presse qu’on ne lâchera pas un ballon jusqu’à la 38e journée. On est aussi très respectueux des équipes que nous affrontons. Cette division est extrêmement relevée. Malgré son classement, QRM est une équipe qui a de la qualité.
Le temps n’est-il pas venu d’un peu moins respecter les adversaires ?
Cela s’appelle avoir de l’humilité. Dans la vie, il faut toujours être très respectueux des gens qu’on affronte. Quand on parle de respect, c’est être conscient de ce qui se passe autour de nous. On a de qualité, les adversaires aussi. Quand on démarre un match, c’est toujours pour le remporter. Mais dans la vie, quand on n’a pas d’humilité, on prend des claques. On est très humbles par rapport à nos qualités et à cette division.
Propos recueillis par Romain PECHON avec Raphaël CORNETTE
Crédits photo : Icon Sport