Ancien membre de la commission technique du district de la Somme et polémiste de l’émission La Tribune sur Ici Picardie, Bruno Paris délivre son décryptage après chaque match de l’Amiens SC. Ce lundi, retour sur la victoire contre Dunkerque (1-0), synonyme de pas décisif dans la course au maintien.
Bruno, peut-on dire que l’Amiens SC a validé son maintien après cette victoire contre Dunkerque ?
Oui, sans doute. Je suis très heureux de cette victoire et aussi de la manière avec laquelle elle a été acquise. Ce n’est pas qu’on voudrait voir cette prestation à chaque match à la Licorne, mais à ce moment précis de la saison, il faut savoir livrer ce genre de match, avec des joueurs qui vont au bout d’eux-mêmes. Il faut féliciter les acteurs d’être allés chercher cette victoire alors que tout le monde était sur les rotules.
Peut-on parler de petit miracle, voire de braquage au regard du scénario de la rencontre ?
Non, pas du tout. En première mi-temps, on a vu une équipe de Dunkerque qui jouait au pas contre une équipe d’Amiens très prudente. Cela s’est un peu débloqué quand Dunkerque a posé quelques banderilles dans le dernier quart d’heure, mais rien de bien fulgurant. J’attendais avec impatience la seconde période. Je pense que Dunkerque pensait l’emporter à l’usure, face à une équipe d’Amiens qui craque dans les 20-25 dernières minutes, comme ça a beaucoup été le cas dernièrement. Et malgré le coup du sort, avec l’expulsion de Louis Mafouta en fin de première période, Amiens a su s’accrocher avec un bloc un peu bas. Maintenant, il faut aussi saluer le changement payant d’Omar Daf avec l’entrée en jeu de Malick Mbaye à la place de Rayan Lutin.
Vous avez évoqué le carton rouge de Louis Mafouta. Peut-on parler de décision logique ?
Sur le coup, on peut comprendre la décision de l’arbitre, qui a vraiment peur que le gardien ne se relève pas. Quand j’ai vu le ralenti, c’est plus discutable. Le jaune aurait peut-être pu suffire pour un excès d’engagement qui aurait pu coûter très cher à l’Amiens SC. J’ai trouvé Monsieur Paradis très moyen dans ses décisions. Maintenant, le carton rouge n’est pas un scandale non plus. Louis Mafouta a manqué de maîtrise, sans que cela soit un acte de brutalité. Cela reste quand même une saison horrible pour lui. Je ne vais pas l’accabler davantage.

Comme quoi, quand on se tourne vers ceux qui sont au bord du terrain, et non pas à ceux qui sont au bord de la piscine, on peut quand même faire venir de bons joueurs.
Bruno Paris à propos de Victor Lobry, consultant le11.fr
Comme tout le monde, on imagine que la criante était grande au moment de se projeter sur une seconde période en infériorité numérique…
Bien sûr. L’Amiens SC se retrouve au pied du mur, Omar Daf avec. Il a fait un choix fort en mettant immédiatement un attaquant à la place de Rayan Lutin, qui n’était vraiment pas brillant, pour qui c’est très difficile en ce moment. Même à dix, je suis persuadé qu’Omar Daf s’est dit qu’il y avait un coup à faire. Finalement, Malick Mbaye marque sur la seule occasion d’Amiens en seconde période. Il a montré beaucoup d’adresse devant le but, une habitude qu’on avait un peu perdue.
S’il y a un joueur qui a incarné l’état d’esprit de l’Amiens SC sur ce match, c’est sûrement Victor Lobry, passeur décisif et auteur d’un gros match défensif. Il est clairement un des hommes forts de cette deuxième partie de saison…
On l’a encore vu partout. Il est très intéressant dans tout ce qu’il fait, même quand il se retrouve plus haut sur le terrain, en soutien de Louis Mafouta ou de Malick Mbaye. Il a cette capacité à transformer un ballon « sale » en ballon propre qui peut déboucher sur une projection offensive. C’est un joueur très précieux, une bonne pioche, un très bon footballeur. En plus de cela, il a une mentalité exceptionnelle. Comme quoi, quand on se tourne vers ceux qui sont au bord du terrain, et non pas à ceux qui sont au bord de la piscine, on peut quand même faire venir de bons joueurs. Omar Daf a eu le nez creux sur ce coup.

Vu le contexte, peut-on dire qu’Omar Daf a réalisé un authentique miracle en décrochant le maintien à quatre matches du terme ?
Je pense qu’Omar Daf a eu la qualité de prendre beaucoup de choses sur lui, même s’il a eu envie d’éclater par moments. S’il avait pété un plomb, je pense que l’équipe serait en position de relégation. On peut lui reconnaître ça. C’est sûr que ce n’est pas l’entraîneur le plus impressionnant dans son attitude, qui va faire de grands gestes devant son banc. On peut toujours lui reprocher ses interviews où il faut vraiment creuser, il faut lire entre les lignes. Par contre, il a fait preuve de beaucoup d’intelligence en analysant les forces en présence. Je suis persuadé qu’il a axé la préparation estivale pour démarrer fort et rapidement prendre des points. Echaudé par la saison dernière et sans doute conscient de ce que ses dirigeants lui réservaient, il savait très bien que le maintien se jouait grandement sur la première partie de saison.
Maintenant que l’Amiens SC est quasiment maintenu, qu’attendez-vous de ce dernier mois de compétition ?
Je pense qu’Omar Daf doit désormais nous offrir des matches avec une équipe un peu plus tournée vers l’offensive. Contre Guingamp, on veut encore voir une équipe soudée, mais qui prend un peu plus de risques. Je ne sais pas si l’effectif va le permettre, mais ce serait bien d’offrir ça aux spectateurs, qui ont vraiment joué le jeu dernièrement. Tout le monde sait que cette équipe ne peut pas jouer le haut de tableau, mais ils ont apprécié de voir des joueurs se vider les tripes pour décrocher deux victoires quasiment synonymes de maintien.
Ça devient de plus en plus compliqué. Il faudra se questionner sur certaines liaisons dangereuses dans ce club.
Maintenant, j’espère voir une équipe un peu plus libérée. Il faut aussi récompenser ses spectateurs qui ont parfois assisté à des matches difficiles dans le grand froid de la Licorne cet hiver. La saison a tout de même été un peu chaotique, même si Amiens a pris beaucoup de points à domicile. Dans quelques temps, on aura l’occasion de faire un bilan de la saison. Il faudra éviter de reproduire une saison similaire, parce que ça devient de plus en plus compliqué. Il faudra se questionner sur certaines liaisons dangereuses dans ce club.
Propos recueillis par Romain PECHON
Retrouvez Bruno Paris et l’ensemble des polémistes de La Tribune ici Picardie ce lundi dès 18 heures.

Crédits photo : Anthony Bibard/FEP/Icon Sport