Une nouvelle fois envoyé au front avant le déplacement de l’Amiens SC à Quevilly, mardi (20h45) à l’occasion de la 34e journée de Ligue 2, Alexis Sauvage assure que l’ensemble du vestiaire est encore mobilisé. S’il reconnaît que ce n’est pas forcément l’image donnée sur le terrain, le deuxième gardien insiste sur la mentalité qui règne au sein d’un groupe qui tourne au ralenti depuis plus de deux mois. Entretien.
Alexis, quel sentiment vous a laissé la défaite de l’Amiens SC contre Dunkerque ?
Ce serait un peu facile de dire : « j’aurais pu faire ci, j’aurais pu faire ça. Que l’on perde ou que l’on gagne, je m’associe au résultat. Cela reste un match très très très frustrant. On peut et on doit faire beaucoup mieux. On ne peut plus se le cacher. C’est une défaite de plus à domicile. S’il y a bien un truc qu’on doit faire, c’est retrouver cet allant à domicile, ce goût de la victoire. Pour nous, pour le classement et surtout pour nos supporters, qui ne nous ont pas lâchés de la saison. C’est aussi pour ça que le groupe s’en veut.
A titre personnel, on connaît votre mentalité de battant. Par contre, on ne ressent pas cet état d’esprit sur le plan collectif ?
Je ne suis pas fataliste. Maintenant, je peux comprendre ce ressenti. Je ne peux rien inventer, je ne vais pas vendre des choses qui n’existent pas. Maintenant, c’est comme vous voulez mais il faut me croire. Je crois aux mecs, je les côtoie au quotidien. Ce n’est pas la première fois que je le dis devant vous. J’ai la dalle, on a tous la dalle, on sait pourquoi on est là, dans quel projet on s’inscrit. Ce projet, on y croît du début à la fin. Ce n’est pas à cinq matches de la fin, avec 44 points, à six points d’un potentiel barrage ou d’une potentielle descente, qu’on va faire un bilan. Même si je peux comprendre qu’une image ressorte, je ne suis pas fou, je vois les matches comme vous. On les analyse aussi. On ne se contente pas de faire les matches et de rentrer chez nous faire la fête. Une défaite comme contre Pau, ça fait super mal. Tous les défaites font mal. Tant qu’on ne sera pas à la fin du championnat, que ce ne sera pas écrit noir sur blanc, je me donne le droit d’y croire.
Mais comment y croire quand on voit ce qu’on voit en ce moment, qu’on a gagné qu’un seul des 11 derniers matches, qu’on reste sur 4 rencontres sans marquer…
Je comprends qu’on se pose un milliard de questions, qu’on soit journaliste ou supporters. Au niveau des joueurs, je ne pense pas. Sinon, il faut lever et dire au coach : « je n’y crois plus ». Et plutôt que d’arriver avec les jambes qui tremblent sur le terrain, laisser la place à un coéquipier qui y croit encore. Ce n’est pas le cas. Les onze qui ont la chance de débuter, ils se tapent pour les sept sur le banc et la quinzaine en tribune ou à la maison. Il y en a qui ont les croisés, d’autres ne savent pas encore ce qu’ils ont. On s’inscrit tous dans un projet, tout le monde croît en ça. Pour y croire, on s’appuie sur le terrain, ce qu’on a déjà fait de bien cette saison. Contre Dunkerque, il ne faut pas tout jeter. Il y a eu des choses positives en première mi-temps.
Une victoire en onze matches, ce n’est pas normal. On le partage tous à 200%, du coach jusqu’au gardien remplaçant, en passant par tous ceux qui ont la chance de jouer. Il faut s’appuyer sur ce qu’on peut faire au quotidien, même si le plus important reste le samedi et non pas les entraînements. Sinon on fait quoi ? On rend les armes et on attend les résultats des autres ? Non, on a la tête baissée dans le travail. Il faut avoir la mentalité d’être là pour Amiens, pas pour faire son match individuellement. C’est cet état d’esprit que tout le monde a au quotidien. Je me répète, mais on fera le bilan à la fin du championnat. Peut-être qu’il sera décevant, peut-être qu’il l’est déjà. C’est vous qui voyez, ce sont les supporters qui voient, parce qu’ils ont vécu des choses ici que je n’ai pas encore vécues. Sachant que l’an dernier, je me maintiens à la dernière seconde avec mon club (ndlr : Laval). Les promesses, c’est une chose, après il faut voir le terrain, les budgets. Est-ce qu’un club comme Bordeaux, qui annonce une montée, n’aimerait pas être à notre place ? Est-ce que la saison est si mauvaise que cela ? Je ne sais pas.
Si on vous suit, vous êtes dans l’incompréhension par rapport à ce qui se passe sur le terrain, qui n’est pas en adéquation avec votre état d’esprit, à vos intentions. N’est-ce pas ça le problème ? Comment trouver les solutions quand on ne parvient pas à faire le diagnostic ?
Ce n’est pas vraiment de l’incompréhension. J’ai connu des joueurs remplaçants, ils en avaient rien à foutre du résultat. Je fais partie de ceux qui, même sans jouer, peuvent transpirer après un match, être le premier debout après une victoire ou être touché après une défaite. Cela me fait chier (sic.) quand je vois tout ce qu’on peut faire au quotidien. Il faut me croire, je n’aime pas mentir. On se casse le cul (sic.) pour retrouver la victoire et une dynamique. Cela ne marche pas et c’est ça qui m’agace en fait. J’ai connu des groupes où on ne tire pas tous dans le même sens, ça peut se comprendre sur une fin de saison. Là, je peux dire que ce n’est pas le cas. Il suffit de prendre l’exemple de Nicholas Opoku, quand on voit ses dernières prestations après quelques matches sans jouer. Il faut s’appuyer sur ce genre de comportement, de caractère et de prestation. C’est pour ça que je dis que personne ne lâche. Je vous rejoins sur le fait que les résultats font chier tout le monde. On ne représente pas assez Amiens, je suis déçu pour tout le monde, mais pas abattu. Sur les cinq derniers matches, il faut appuyer sur l’accélérateur, ne pas se poser de question. Pour le moment, je refuse de dire qu’on a raté la saison. Ce n’est pas ce que je vois et ce que je ressens au quotidien. C’est pour ça que les résultats actuels me déçoivent.
Votre président a récemment été l’auteur de plusieurs sorties médiatiques remarquées, avec des mots durs. Comment cela est-il vécu au sein du groupe ?
Si je suis là aujourd’hui, c’est grâce à lui. S’il n’est pas content de ce que je fais, je la ferme et je travaille. Si demain il m’appelle et me dit : « félicitations pour ton match », je lui tape dans la main et je le remercie. C’est comme ça que je vois les choses, c’est comme ça que le groupe et le staff voient les choses. Le président dit ce qu’il veut, on doit le suivre. C’est le boss, c’est le patron, c’est son club, c’est lui qui est tout en haut. C’est à toi de corriger les choses. Quand il déclare des choses, tu le prends pour toi, tu le gardes sous le bras, tu remets le bleu de chauffe. Le match suivant, tu dois avoir ça dans un coin de tête, comme tu gardes parfois les phrases qui peuvent être écrites par les journalistes, ce que le coach peut reprocher. C’est comme ça qu’on avance. Dans le foot ou ailleurs, je n’ai jamais rien lâché et ça m’a toujours donné raison. On va faire ces cinq derniers matches avec le coeur, avec tout ce que vous voulez. S’il faut rester une heure à parler après le match avec les supporters, on n’hésitera pas. On n’est là pour simplement laisser le club en Ligue 2.
Cela en devient une question d’orgueil et de fierté ?
Je partage ça à 200%. Quand à la fin, les supporters nous incitent à venir les saluer ou pas, je peux parfaitement le comprendre. Quand on ne donne pas suffisamment de spectacle, je peux comprendre que les supporters soient déçus. Ce sont des gens à fond derrière le club, qui permettent de le faire vivre. On leur doit quelque chose. Ils nous encouragent de la première à la dernière seconde. Ils font partie du même projet. En tout cas, je me donne le droit d’y croire et j’espère que beaucoup de gens qui verront mes propos se donneront aussi le droit d’y croire. Peut-être que certains se diront qu’il faut que j’arrête de rêver, que c’est fini. Je m’excuse pour eux, ils n’ont pas eu ce qu’ils méritent d’avoir, de rêver plus longtemps dans la saison.
Maintenant, je rappelle que Laval a accroché son maintien à la dernière seconde. Aujourd’hui, notre maintien n’est pas loin d’être acquis, à cinq matches de la fin. L’an dernier, Amiens s’était maintenu à deux journées de la fin. On aurait eut-être pu l’avoir plus tôt, il y a deux ou trois matches de ça. On va aussi me dire qu’il faut peut-être regarder en haut. Je suis partisan de ça, je suis un mec hyper ambitieux. Cela ne m’intéresse pas de jouer le maintien, surtout dans un club comme Amiens, on va tout faire pour prendre le maximum de points jusqu’à la dernière seconde.
Propos recueillis par Romain PECHON
Crédits photo : Sandra Ruhaut/Icon Sport