Théo Boucher : « Je voulais réarbitrer rapidement »

EXCLU LE 11 – Moins de quinze jours après son agression à Salouël, Théo Boucher a repris le sifflet pour un match de coupe entre les équipes U15 de Lignières Chatelain et l’AS2A. Déterminé à ne pas se laisser abattre, le jeune officiel de 18 ans se confie sur ce retour rapide sur les terrains. Entretien. 

Théo, vous venez de réarbitrer votre premier match depuis votre agression…

C’était mon choix, je voulais réarbitrer rapidement. Au départ on m’a dit non. Finalement, j’ai reçu ma convocation mardi dernier. A la base, je devais arbitrer à Conty mais c’était rendu public et ils ont préféré changer de match par rapport à l’effervescence médiatique que ça pouvait provoquer. Finalement, ils ont opté pour une désignation confidentielle, même les clubs ne savaient pas que j’allais les arbitrer. Finalement, j’ai fait un match U15 à Lignières Châtelain.

Et quelles sont vos premières sensations après ce match ? 

Tout s’est très bien passé. C’était vraiment un match très agréable à arbitrer. J’ai même reçu les compliments de Pascal Tranquille (ndlr : président du district de la Somme) qui était présent.

Avez-vous senti un regard différent de la part des acteurs ? 

Je ne sais pas si tout le monde m’a reconnu, en tout cas je n’ai pas eu besoin de questions et de réflexions. Seul le président de Lignières Châtelain, qui a fait office d’arbitre de touche, qui m’a beaucoup parlé avant la rencontre. A un moment donné, un joueur a contesté ma décision, je lui ai mis un carton jaune. Un deuxième joueur est arrivé pour discuter et tout de suite l’entraîneur de l’équipe concernée est intervenu pour demander à ses joueurs de stopper ça.

Je voulais aussi envoyer un message à mes agresseurs, leur montrer que j’allais continuer, que j’allais pas pleurer dans mon coin et sur mon sort.

Pourquoi reprendre aussi vite ? 

Je voulais juste ne pas me laisser abattre. Je voulais aussi envoyer un message à mes agresseurs, leur montrer que j’allais continuer, que j’allais pas pleurer dans mon coin et sur mon sort. J’ai un très bon accompagnement du district, Pascal Tranquille était présent sur ce match. Mon parrain (Allan Auger) était également là. Je trouve que j’ai fait un bon match, je n’ai pas eu le sentiment d’être perturbé. C’est un match impeccable à mes yeux. Les instances avaient peur que mon autorité naturelle soit impactée par mon agression, j’avais à cœur de prouver qu’elle était toujours bien présente.

Avez-vous été libéré d’un poids à l’annonce de l’interpellation de vos agresseurs ? 

Quand j’ai entendu dire que l’enquête était prise en main, avec le soutien d’un ancien arbitral fédéral, j’ai compris que c’était pris au sérieux. On m’avait prévenu qu’ils seraient interpellés en début de semaine. On peut dire que ça m’a enlevé un certain poids, oui. En plus, elles sont interdites d’enceinte sportive jusqu’à leur jugement en juin prochain.

Vous venez de vivre quinze jours très particuliers. Comment avez-vous vécu tout ce tapage médiatique ? 

Au début, j’ai été dépassé par tout ça et l’ampleur que ça pouvait prendre. Franchement, au bout de quelques jours, ça commençait vraiment à me saouler. Je me faisais appeler tous les deux heures, ça devenait agaçant. Après j’ai eu des sollicitations de partout, dont certaines que j’ai voulu honorer parce qu’elles me tenaient à cœur. Sur le plan médiatique, ça a vraiment pris une tournure importante, lourde et un peu oppressante. Même si ça a peut-être permis de faire parler de ce problème de l’agression des arbitres.

Vous êtes un peu devenu le symbole de toute une corporation dont vous avez libéré la parole…

Mon agression m’a fait réaliser beaucoup de choses. Je trouve qu’on a beaucoup parler de la mienne, alors qu’il y en avait eu beaucoup avant moi. J’ai peut-être porté la parole de ma corporation et permis à d’autres de s’exprimer sur ce qu’ils avaient également vécu. Il faut en parler, faire prendre conscience à tout le monde du problème. Je suis quand même un jeune adulte de 18 ans qui a pris la parole, je pense que ça va aider d’autres arbitres à le faire également.

Disposez-vous d’un accompagnement psychologique ? 

Non, je n’en ai pas ressenti le besoin pour l’instant. On dit souvent que ça peut prendre 15 jours ou un mois pour bien se déclarer. Pour le moment, je préfère ne pas prendre de psychologue. Je pense que les messages de soutien ont remplacé le suivi psychologique. J’ai aussi le soutien des arbitres de Ligue et même des arbitres de Ligue 1 ou de Ligue 2, ça fait beaucoup de bien.

Quelle est la suite des événements pour vous ? 

Je vais reprendre un rythme normal, en arbitrant normalement chaque week-end. Je vais aussi devoir honorer certaines invitations, il y en a une du district de l’Oise le 26 mai prochain, il y a des matches de gala, des tournois… Je vais être pas mal occupé d’ici cet été.

Tous propos recueillis par Romain PECHON

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