Si l’Amiens SC va vivre une fin de saison sans le moindre stress, avec 42 points au compteur à cinq journées du terme, elle n’en a pas moins été stressante et usante pour Philippe Hinschberger. Confronté à un groupe indiscipliné, l’entraîneur amiénois compte sur des changements à l’intersaison pour ne plus revivre cela. Entretien.
Philippe, votre président a soutenu votre choix de frapper fort encore une fois à Caen. On imagine que ce soutien est une bonne chose, mais ne doit-il pas être dans une autre position que la simple position de commentateur ?
Je tiens le président au courant quand je prends des décisions comme ça et après la direction fait ce qu’il faut au niveau des sanctions qui sont plus financières. Je trouve que c’est bien que le président soit derrière son staff parce que ce ne sont jamais des décisions agréables, ça peut parfois mettre l’équipe en péril mais pour l’instant on s’en est plutôt bien sorti par rapport à tout ça. J’ai toujours confiance en l’être humain jusqu’à tant que l’on me montre que je ne peux plus avoir confiance et à un moment donné, je fais des bêtises, comme lui. Concernant le président, il est satisfait de notre état d’esprit actuellement, il a tenu à le souligner. Ce n’est pas quelqu’un qui prend la parole ou écrit souvent. C’est toujours bien d’avoir le soutien des dirigeants, mais c’est globalement comme ça depuis le début de la saison.
A-t-il toujours été en phase avec vous sur la partie disciplinaire et les sanctions prises au fil de la saison ?
Il m’a chargé de régler les problèmes qu’il pouvait y avoir. Dans d’autres clubs ça se passe différemment parce qu’il y a quelqu’un qui est en prise directe sur la direction ou l’administratif, ce qui n’est pas forcément le cas ici, ou pas toujours, d’autant plus que l’organisation du club a changé depuis décembre. Il y a un tas de petits problèmes que l’on peut régler au quotidien sans que cela ne fasse de vagues. Après, les choses importantes, il faut taper dessus.
L’Amiens SC ne dispose pas de directeur général ou de directeur sportif. Est-ce un manque selon vous ?
Trop de personnes, ce n’est pas bon non plus. Je n’ai jamais vraiment connu ça parce que je n’ai jamais entraîné de grands clubs, mais il y a parfois un directeur général, un directeur général adjoint, un directeur technique, un directeur du football, un directeur sportif… Je me demande bien ce que tous ces gens peuvent faire mais il y a bien de la place pour eux. Ce n’est pas pire que tout d’être en prise directe avec la plus haute instance du club. Ca ne me dérange pas du tout. Après, quand j’ai un souci avec un joueur, j’en parle avec John (Williams) et on évite d’embêter le président avec ça. Tout ce que l’on peut régler dans notre coin, sans que ça ne fasse de vagues, c’est mieux. Les retards sont gérés d’une façon, l’année prochaine ce sera différent avec une plus grosse charge du vestiaire sur tous les problèmes autonomes. Cette année, on a eu pas mal de grosses anomalies et je pense que l’institution doit taper fort, c’est obligatoire. Ce sont des joueurs qui dérapent, du manque de respect, des absences à l’entraînement. Ca peut arriver, et il faut cogner fort. Après, tu ne peux pas être à 35 en comptant tout le monde et que ça se passe bien tout le temps.

Sentez-vous votre direction réellement sensibilisée par ce que vous vivez au quotidien ?
Les gens qui sont concernés au quotidien, c’est le staff technique et ceux qui sont là tout le temps. Il n’y a pas beaucoup de présidents qui sont présents au quotidien dans le vestiaire et ce n’est franchement pas le rôle. Un patron a des directeurs, il y a quelqu’un qui s’occupe de faire vivre le groupe au quotidien, préparer les matches. Il faut bien différencier ce qui peut arriver et n’est pas grave et ce qui est plus grave et pénalisable pour le comportement de chacun.
Ce genre de problème n’est pourtant pas nouveau à l’Amiens SC et on a le sentiment que vos supérieurs n’ont pas forcément retenu les leçons du passé…
Il faut changer des choses, mettre des choses en place pour que ça n’arrive plus. C’est comme un carton jaune que tu prends pour un tacle non maîtrisé ou parce que tu dis à l’arbitre que c’est un con. Ce sont des situations différentes et la sanction ne doit pas être la même. C’est pareil ici. J’ai mon idée de comment je veux fonctionner l’année prochaine pour que je ne sois plus dans ce rôle comme dans les deux ou trois derniers mois à fliquer tout le temps. Ca bouffe de l’énergie, c’est assez énervant. Je préfère me concentrer sur ce qui est le plus important, à savoir l’équipe, le terrain et la préparation des matches.
Pour cela, il faut aussi avoir des relais dans un vestiaire et on a le sentiment que ça vous a fait défaut cette saison…
C’est plus facile quand tu as des relais dans le vestiaire ou des gens qui sont là pour faire régner un peu l’ordre. Est-ce qu’on en aura, je ne sais pas, est-ce qu’on en avait cette année, pas beaucoup et on a déjà fait ce constat. Après quelques mois de vie commune, je trouve que ce vestiaire commence à se lâcher un peu. C’est un peu tard mais c’est toujours ça. Il faut une prise de conscience pour comprendre que le vivre ensemble c’est bien aussi.
Si je devais faire ça, je pourrais envoyer la moitié de l’équipe.
Dans ce contexte, vous devez être soulagé que l’Amiens SC n’ait pas à lutter pour son maintien sur cette fin de saison…
On a fait ce qu’il fallait pour ne pas avoir à le faire et on a globalement tout ce qu’il faut pour passer une fin de saison tranquille où j’ai envie de prendre des points encore, de gagner. Il reste cinq matches et arriver aux alentours de cinquante points serait pas mal. On va commencer par Le Havre qui s’est bien refait la cerise sur les deux derniers matches. On a dirigé ce groupe de joueurs qui a été capable de remettre l’équipe et le club dans le bon sens.
Avez-vous été tenté de marquer le coup et de terminer la saison sans certains joueurs voire d’en envoyer en équipe réserve ?
C’est possible, oui mais je suis toujours dans l’état d’esprit de mettre la meilleure équipe possible pour bien finir la saison, mais si des garçons sont souvent hors des clous, ce qui peut arriver… Après on ne va pas rester dessus 107 ans. Si je devais faire ça, je pourrais envoyer la moitié de l’équipe. On est dans les dernières semaines de la saison, l’objectif est de garder tout le monde concerné, ceux qui le sont moins ne jouent pas ou ne sont pas dans le groupe
Propos recueillis par Romain PECHON
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