Maxime Spano : « J’ai fait face à des gens incompétents »

Spano VAFC
Matthieu Mirville/Icon Sport

Libre de son contrat qui le liait au VAFC depuis l’été dernier, Maxime Spano a récemment retrouvé un nouveau club, en Lituanie. Dans un entretien exclusif, le défenseur central revient sur les bons moments, mais aussi sur l’année de galère qu’il a vécue à Valenciennes en 2021-2022.

Que retenez-vous de votre passage à Valenciennes ?

Beaucoup de choses, des bonnes et des moins bonnes comme la dernière saison où je n’ai quasiment pas joué, j’ai été mis de côté mais sans réelle raison valable. Je sais pourquoi j’ai été écarté. J’ai fait face à des gens incompétents. Ma première saison ici était la meilleure saison du club en Ligue 2 en finissant septième et avec la meilleure défense, j’ai joué trente matches; je pense que j’ai fait l’unanimité. La deuxième, je crois que l’on finit onzième, c’était en demi-teinte mais le maintien a été facilement acquis, même si les ambitions de montée ou d’accrocher les barrages étaient là au début. Au fil du temps, les choses sont compliquées à Valenciennes parce qu’il y a des mots mais les choses ne sont jamais faites, les moyens ne sont jamais mis. Le président vit un peu dans un monde parallèle. Pour revenir sur la dernière saison, elle était catastrophique à mon échelle dans le sens où je pense que j’étais un titulaire indiscutable sur les deux premières saisons, j’étais un homme fort et j’ai été mis à l’écart malgré mes prestations, d’abord par Olivier (Guégan). Il y a eu quelques trucs que je n’ai pas forcément appréciés mais c’était anecdotique sur certaines choses. Je ne lui en veux pas tellement. Par contre être mis à l’écart quand le coach de la réserve a pris les fonctions, je ne me rappelle même plus de son nom, alors que tu joues le maintien jusqu’à la dernière journée, tu prends but sur but, tu es catastrophique et que tu n’as aucune raison de ne pas me faire jouer… Le premier jour, il est arrivé, m’a dit qu’il ne m’avait jamais vu jouer alors que j’avais plus de soixante matches au club. Il y a des choses qui montrent que ce sont des gens incompétents. D’ailleurs, lui-même était perdu. C’était le choix de la facilité et de l’urgence, ce que je peux comprendre. La dernière saison a été très compliquée dans l’ensemble. Je pense que je méritais de jouer, j’ai fait quelques matches, j’ai regardé les matches de cette saison-là et à part contre Pau, je n’ai rien à me reprocher. On avait enchaîné deux victoires à l’extérieur contre Dijon et Caen où j’étais vraiment costaud, je me suis senti bien. Comment dire que je suis très frustré et déçu de la façon dont ça s’est terminé ? Je ne méritais pas ça, surtout dans une période où on a joué le maintien jusqu’à la fin de la saison. Je suis sûr qu’avec mes qualités, j’aurais pu apporter à l’équipe. J’ai été mis de côté pour des raisons extra-sportives et je le regrette.

Quelles sont les causes de votre mise à l’écart ?

Avec Olivier, ça a commencé sur une incompréhension. Je me suis blessé légèrement avant le début du championnat alors que j’avais fait toute la préparation et je partais en tant que titulaire comme d’habitude. Je me blesse dix jours avant le premier match, je ne m’entraîne pas mais le coach voulait me faire jouer à tout prix contre Niort. Je m’entraîne la veille du match mais j’avais encore une douleur à l’ischio, je lui en fais part le jour du match et je lui dis que je ne peux pas jouer parce que je me connais, je suis professionnel, je connais mon corps et je savais que si je jouais, j’allais me péter. A ce moment-là, il y a eu une petite cassure. Il était peut-être sous pression, a dû penser que je trichais, chose que je n’ai jamais faite, et a décidé de me mettre de côté dès ce moment. J’ai mis du temps à revenir dans l’équipe parce que mon premier match en tant que titulaire était contre Rodez et c’était quelques semaines après. Ensuite, il s’est fait virer, Delmotte est arrivé et même si ça n’a pas été dit, je suis convaincu que j’ai été mis de côté parce que j’étais un joueur d’Olivier Guégan. Il m’a ramené à Valenciennes. Je pense que tout le monde l’a ressenti comme ça. Je ne suis pas le seul à le penser. Quand on prend tout l’effectif, trois joueurs n’ont pas joué de l’année mis à part sur un des deux derniers et ce sont Arsène (Elogo), Eric (Vandenabeele) et moi. Moi, c’était encore différent, parce que j’avais prouvé, fait mes matches, j’étais bon. Le pire, c’est que l’équipe était en difficulté. Si encore, on jouait le haut de tableau, j’aurais compris. Les résultats auraient parlé pour le coach, bravo. Mais là, on a flirté avec la relégation toute l’année, et il n’a pas été capable de nous faire jouer une seule minute. Vis-à-vis de moi, c’est du foutage de gueule et un grand manque de respect. J’ai toujours tout donné au club, je n’ai jamais eu un mot plus haut que l’autre, j’ai toujours respecté mes coéquipiers, le staff, le club. Je me suis toujours donné à l’entraînement, je n’ai jamais trahi mes copains en faisant des entraînements de merde. J’ai été professionnel du début à la fin, tous les joueurs en sont témoins. Je ne méritais pas ce traitement, clairement.

Et vous êtes resté discret malgré cette mise à l’écart…

Complètement. Je n’ai pas fait de bruit, je ne suis pas allé parler dans les médias alors que j’aurais pu le faire en février ou en mars quand je sentais la fin. J’aurais pu lâcher, envoyer des bombes, faire exploser le vestiaire. J’ai un fort caractère et dans un vestiaire, il suffit de monter trois ou quatre personnes entre elles et le vestiaire explose. Dans une période où tu joues le maintien, ça peut vite devenir compliqué. Je ne l’ai pas fait parce que je respectais mes coéquipiers et le staff. Pas le coach, le staff. Je suis quelqu’un d’intègre, j’ai des valeurs. J’ai été droit du début à la fin et c’est pour ça que je ne méritais pas ce traitement, d’autant plus que j’ai prouvé des choses à Valenciennes. Si encore, je n’avais rien fait, ok, mais j’ai joué, j’ai montré mon visage, j’ai toujours été. En fin de saison, à partir du mois d’avril, on nous a interdit d’aller en réserve. On ne voulait plus de nous. Malgré ça, on a toujours été professionnel, que ce soit Arsène ou moi. On n’a jamais eu un mot plus haut que l’autre.

Le président m’a fait miroiter une prolongation pour au final me dire qu’ils ne prolongeraient personne.

On ressent énormément de frustration sur cette fin d’aventure…

De la frustration mais aussi de la colère et de la tristesse. Quand tu fais le bilan de la saison, je ne méritais pas ça au regard de tout ce qui a pu se passer. A Valenciennes, j’ai commencé de la meilleure des façons, on a fait une super première saison, des joueurs ont été récompensés avec des prolongations de contrat. Ils ont voulu me prolonger dès la première partie de la deuxième saison, on a eu des discussions, le président m’a fait miroiter une prolongation pour au final me dire qu’ils ne prolongeraient personne dès que les barrages n’étaient plus accessibles. Où est la gestion ? Comment gère-t-il son effectif ? Je ne suis pas étonne. Quand je suis arrivé, les supporters criaient déjà « direction démission », je ne comprenais pas pourquoi parce que, de l’extérieur, le président semblait faire les choses correctement, notamment la première saison, mais c’est parce que ça se passait bien de partout, on avait les résultats. Petit à petit, j’ai compris que le président n’a des ambitions que dans la parole. Sur le reste, ça ne suit pas.

C’est d’ailleurs cette déconnexion qui lui est souvent reprochée…

L’an dernier, quand il annonce qu’il veut jouer le top 5, ça nous a fait bien rire ! Quand tu fais un recrutement à la dernière minute, que ton effectif est relativement jeune et que tu baisses les primes collectives, quel message envoies-tu à ton équipe ? Je ne vois pas où tu mets les moyens de tes ambitions. C’est assez marrant.

Comment le vestiaire a pris cette ambition de top 5 ?

La première année, il n’en avait pas parlé parce qu’il y avait du renouveau. On n’avait pas un gros effectif mais on était uni autour du coach. Quand tu finis septième avec la meilleure défense, tu te dis que tu vas jouer le top 5 l’année d’après, ça reste cohérent. Mais quand l’été dernier, il annonce le top 5, on savait très bien qu’on allait droit dans le mur. Je ne vais pas donner de noms, mais avec certains joueurs on a discuté, et on savait qu’on allait dans le mur. Dès la préparation. On se disait « cette année ça va être la merde, on va jouer le maintien ». On le savait. Ca nous a fait bien rire d’entendre parler du top 5.

La baisse des primes est en accord avec la difficulté financière du club…

Qu’un club de Ligue 2 ait comme modèle de former des joueurs et de vendre, je l’entends. C’est un championnat compliqué, il n’y a pas de gros moyens, les droits télés ne sont pas énormes. Mais il faut être en adéquation. Ne va pas dire que tu joues le top 5 quand tu fais tout pour faire partir tes meilleurs éléments, que tu réduis ton budget. Arrête de balader les supporters et les joueurs ! On peut dire ce que l’on veut mais Valenciennes, depuis la Ligue 2, ce ne sont que des saisons où tu te maintiens sur la fin, à part une saison ou deux. Au bout d’un moment, sois en adéquation avec ce que tu fais, pas l’inverse ! Cette saison se passe plutôt bien et tant mieux pour eux, je suis content pour les joueurs qui sont là-bas mais aussi pour les supporters. Ils méritent, mais ce qui est fait ne reflète pas ce qui est dit.

Je pense que le président est dans une bulle où il n’y a que lui et son fils. Ils sont deux, ils se regardent et c’est à qui va dire la plus grosse bêtise.

Et tout cela vient uniquement du président ?

Je vais revenir sur la première saison, mais quand on finit septième, on voulait le top 5, le président aussi et c’est normal. Quand tu prends la deuxième partie de la deuxième saison, ça se passe moyennement, tu prends beaucoup de buts, il n’y a pas trop de résultats, mais on sentait que ça allait être compliqué derrière. La seule personne qui fixe ces objectifs, c’est le président, mais en interne on sait très bien que l’on n’atteindra pas ces objectifs, il faut arrêter de se trouver des excuses et de se moquer des gens. Je pense que le président est dans une bulle où il n’y a que lui et son fils. Ils sont deux, ils se regardent et c’est à qui va dire la plus grosse bêtise. Pensez déjà à stabiliser le club, à finir dans la première partie de tableau, à se rapprocher petit à petit du haut. Il faut être en adéquation avec ce que tu fais, pas ce que tu dis.

A-t-il été question de rester après le départ de Christophe Delmotte ?

Non, aucunement. Ils voulaient nettoyer le passage de Guégan, et ça passait par ne pas me prolonger. De toute façon, au vu de ma dernière saison, ça ne pouvait pas en être autrement. J’étais très heureux à Valenciennes, vraiment. Je n’avais qu’une envie à un moment, c’était de prolonger. J’avais 27 ans, et j’étais encore jeune, tout en ayant de l’expérience. Prolonger était la suite logique de grandir avec Valenciennes, mais ça n’est allé que dans un sens. J’ai eu des promesses qui n’ont jamais été tenues et quand Olivier s’est fait limoger, on savait très bien comment ça allait se finir.

Gardez-vous malgré tout un bon souvenir de cette expérience dans le Nord ?

Certains maintiennent le club à flots, je pense à Jérémie Janot, Ahmed Kantari et l’intendant Eddy Duquesnoy. Au-delà de leurs compétences, ce sont des personnes humainement magnifiques. J’ai apprécié mon passage à Valenciennes aussi grâce à ces personnes qui ont toujours été là pour moi, m’ont toujours soutenu. Ce sont des personnes formidables. On ne croise pas tous les jours ce genre d’hommes dans les clubs, et ils ont grandement contribué à ce que je passe de belles années à Valenciennes, je les en remercie.

La deuxième partie de notre entretien avec Maxime Spano sera disponible ce dimanche à 10 heures sur notre site, Le 11 Valenciennois.

Propos recueillis par Arthur Lasseron, avec Adrien Rocher

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