Puni à chaque fois dans le temps additionnel à Montpellier (2-2), à Nice (2-2) et contre Lyon, le LOSC a laissé filer six points en un mois dans ces moments précis. De quoi nourrir de la frustration et des interrogations. Questionné à maintes reprises à ce sujet en conférence de presse ce jeudi, Bruno Genesio a fait le tour de la situation, de ses causes et des pistes de réflexion ouvertes.
Bruno, avec le recul, appréhendez-vous mieux la question des fins de match après les déconvenues contre Lyon, Nice et Montpellier ?
Je pense que les analyses sont faites sur le moment présent. Quand on prend sur la globalité, on n’a pas plus encaissé de buts en fin de match que d’autres équipes de Ligue 1. Si on ramène au nombre de match, on n’est pas plus friable que les autres équipes. Ce qui fait qu’on met l’accent dessus, c’est le fait que c’est dans un passé récent. Évidement que je m’interroge sur ces buts encaissés en fin de match, mais je pense qu’y penser et le rabâcher ça est un ancrage négatif qui peut contribuer à ce que cela se répète. On va lutter contre ça, il y a des pistes et des outils. Je le fais depuis quelque temps déjà dans mes causeries, force est de constater que cela ne fonctionne pas encore. J’ai bon espoir que cela fonctionne avant la fin d’année.
Vous avez évoqué un aspect mental, mais l’aspect tactique est-il aussi à remettre en cause avec une équipe qui pourrait trop reculer dans ces moments ?
Je pense que les deux sont liés. Quand on mène au score, il y a des moments où il faut être capable d’être solides, tous ensemble, et d’autres où il faut continuer à poser des problèmes à l’adversaire car c’est le meilleur moyen de défendre. Un grand entraîneur, Johan Cruyff, disait que le meilleur moyen de défendre était d’avoir le ballon. Quand vous avez le ballon, l’adversaire ne peut pas se créer d’occasions et vous ne pouvez pas être mis en danger.
En ce moment, on est un peu dans un entre-deux. Il y a à la fois l’aspect mental qui conduit à un comportement tactique pas adapté. Mais le point de départ, c’est qu’on pense trop aux résultats, qu’on pense trop à conserver le score, qu’on pense trop aux conséquences d’une victoire. Il faut avant tout penser à ce qu’on a à faire, et le faire jusqu’à la fin du match. Et non pas faire des projections en cours de match ou à cinq minutes de la fin. Continuons à jouer, jouons comme on sait le faire.
Ces fins de match amènent-elles aussi de la frustration ?
Oui, mais la frustration ne doit pas nous entraîner vers un jeu qui ne nous correspond pas. Nous avons des objectifs, mais les objectifs sont en fin de saison, au coup de sifflet final de la 34e journée. Tant mieux si on est sur le podium ou dans les quatre premiers à la trêve hivernale, mais cela ne veut rien et ne nous donnera aucune garantie de l’être à la 34e journée. Si on ne l’est pas, cela ne donnera rien de mauvais par rapport à la suite du championnat. Il faut vraiment se concentrer sur le présent, ce qu’on a à faire, sur les moyens qu’on doit utiliser pour atteindre cet objectif de fin de saison et non pas sur du très court terme. On sait que l’on doit gagner des matches, mais je pense que c’est une erreur de faire les comptes en cas de victoire ou non. Ce qui est important, c’est de continuer à faire ce que l’on fait de bien dans notre jeu et de corriger ce qui peut nous amener à perdre des points. Non pas sur les conséquences positives ou négatives. On tirera le bilan en fin de saison.
C’est peut-être le problème de ce club sur les trois dernières saisons. Peut-être qu’on met trop l’accent sur ce qu’on doit atteindre avant le match. À la 93e minute de la 34e journée la saison passée, le club était en Ligue des champions. À la fin du match, ce n’était plus le cas. Enlevons ces freins qui sont avant tout mentaux et provoque des mauvais comportements tactiques : soit on défend mal, soit on n’attaque plus. Continuons, arrêtons de penser au résultat et à ce qu’il va provoquer au niveau des classements. Il restera encore 19 matches, on aura le temps de voir ce qu’il va se passer. C’est vraiment important mentalement que les joueurs, le staff et tout l’entourage du club soit dans cet état d’esprit.
Y a-t-il aussi la possibilité que votre groupe soit émoussé en fin de match à cause de l’enchaînement des matches ?
Je crois beaucoup au relâchement, à la confiance et à l’aspect mental. Je vais prendre un contre-exemple : les penalties, sur lesquels il y a un débat. Quand Jonathan David tire son deuxième penalty à Montpellier (2-1, 54′), il réalise son geste technique car il est lié au mental, au sang-froid qu’il a pour tirer ce deuxième penalty. Le gardien part au bon endroit, s’il est un peu moins bien tiré il n’y a pas but. Le geste technique dépend de son mental. Il est sûr de lui, relâché, confiant, c’est comme cela qu’on réussit les choses. Il n’y a rien de pire que de trop réfléchir aux conséquences, c’est pareil dans la vie. Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas être concentré quand vous êtes tranquille et relâché. Je pense qu’on a un vrai travail à faire là-dessus. Ce n’est pas parce qu’il est fatigué ou qu’il n’est pas bon technique que Bafo (Diakité) rate ce dégagement (2-2, 90+3′). C’est simplement il y a de la tension, du doute, et qu’on pense trop à ne pas prendre ce but.
Comment se matérialise votre travail sur l’aspect mental ? Y a-t-il notamment l’intervention d’une personne extérieure ?
Pour l’instant, il n’y pas d’intervention de quelqu’un de l’extérieur. J’ai rencontré un professionnel de l’aspect mental pour avoir son avis et explorer des pistes que je n’aurais pas. Ce qui me rassure, c’est qu’il m’a donné beaucoup d’indications sur des choses que je fais déjà. Je pense qu’on a encore à ancrer cela dans la tête de nos joueurs et de tous ceux qui sont à leur contact. Je pense qu’il est aussi essentiel de prendre beaucoup de recul par rapport à ce qu’on peut lire, je fais passer ce message à travers vous (les journalistes) aujourd’hui pour qu’on lutte contre cela. C’est une partie de nos problèmes aujourd’hui. »
Gabriel Gudmundsson : « Les fins de match ? C’est une bonne question. Je n’ai pas la réponse. Si on veut être à un plus haut niveau, il faut travailler dessus. Si on avait gagner ces points, on serait peut-être deuxième. C’est une bonne question, un sujet dont on parle beaucoup dans le groupe pour trouver la solution. C’est aussi frustrant pour nous. En espérant que l’on puisse changer cela pour les matches suivants. »
Propos recueillis par Enzo PAILOT
Crédits photo : Pascal Della Zuana/Icon Sport