Pari de l’Amiens SC pour renforcer un poste de latéral gauche dépeuplé, Rémy Vita revient en France entouré d’incertitudes après une maigre saison aux Pays-Bas. Il n’en reste pas moins que le Franco-Malgache pourrait se révéler comme le spécialiste du poste attendu depuis longtemps à la Licorne. Présentation.
À Troyes, une formation dans l’ombre avant l’envol
À voir son transfert au Bayern Munich dès 19 ans, on pourrait croire que Rémy Vita était un grand espoir reconnu à l’ESTAC et à l’échelle national. « Pour être franc, ce n’est pas un joueur dont on avait beaucoup entendu parler avant qu’il soit propulsé titulaire par Laurent Batlles à l’époque (au début de saison 2020/2021, ndlr) », assume Guillaume, membre de la page X Le Café Troyen. Pour preuve, le latéral gauche n’a connu aucune sélection chez les équipes de jeunes françaises, et n’a effectué ses débuts professionnels qu’à 19 ans, après deux saisons en équipe réserve (National 3). Un joueur « dans les temps », « pas considéré comme un futur crack », ni plus ni moins. Avant l’explosion soudaine.
Au coup d’envoi de l’exercice, Laurent Batlles fait face à un problème. « À l’époque, en latéral gauche de métier, nous n’avions que Terence Baya, tout juste arrivé d’Avranches en National, recontextualise le suiveur troyen. Rémy Vita a fait le début de saison à ce poste et ne nous a pas déçus. » Il a aussi tapé dans l’œil du Bayern Munich qui, après seulement cinq matches de Ligue 2, profite du contrat stagiaire du jeune latéral de 19 ans pour s’attacher ses services moyennant une compensation d’un peu moins de deux millions d’euros. « C’était cadeau », estime Guillaume, qui relate les sentiments des supporters troyens un mois après l’arrivée du City Football Group au club : « On était un peu tristes de le voir partir et de ne pas voir le joueur se développer chez nous ».
À l’étranger, un destin mitigé
C’est donc sur le grand Bayern Munich que le principal intéressé mise pour poursuivre son développement. Un choix osé et qui s’avèrera, dans l’ensemble, peu concluant. Après seulement une saison mitigée avec l’équipe réserve du club bavarois (22 titularisations sur 38 possibles en D3 allemande, 1 apparition sur la feuille de match avec l’équipe première), Rémy Vita découvre un troisième pays à 20 ans : direction l’Angleterre et le Championship (D2) avec Barnsley.
Prêté dans le Nord de l’Angleterre, le Franco-Malgache vit d’abord un calvaire (aucune apparition jusqu’en janvier) avant de s’imposer comme un titulaire sur le flanc gauche, tantôt en latéral, tantôt en piston. Six mois convaincants qui lui permettent d’obtenir un transfert au Fortuna Sittard, en première division néerlandaise, où son développement prend un nouveau coup. Une première saison mitigée (28 matches, 11 titularisations TTC) dans le 4-3-3 de Julio Velazquez où il s’avère encore un peu tendre, la seconde (en 2023/2024) encore plus délicate avec Danny Buijs. L’ancien Troyen n’a disputé que 17 rencontres, dont seulement trois en 2024.
Rémy Vita, le profil idoine pour l’Amiens SC ?
Rémy Vita débarque donc dans la Somme auréolé d’incertitudes et impacté par un manque de rythme criant. Un latéral de 23 ans qui a peiné à enchaîner ces derniers mois peut-il être l’homme providentiel à un poste en délicatesse depuis quelque temps à l’Amiens SC ? « Malgré son jeune âge, les voyages lui ont donné de la maturité et de l’expérience », note Omar Daf, entraîneur de l’ASC. « Ça fait quatre ans qu’il bourlingue partout en Europe et il a donc dû s’aguerrir et prendre du volume de jeu par rapport à son époque à l’ESTAC », enchérit lui Guillaume.
Car lors de son passage troyen, sa seule expérience en Ligue 2, le jeune homme était « encore un peu juste dans l’impact défensif même si à 19 ans, on sentait qu’il pouvait plus que dépanner sur la saison à venir », se souvient l’observateur aubois. Boule d’énergie sur son couloir, Rémy Vita peut compter sur un centre de gravité bas (1,70m) pour répondre aux arabesques d’un ailier vif, en dépit d’une solidité dans les duels limitée et d’une science défensive qui n’est pas la plus développée. Qu’importe, l’Amiens SC a misé sur un latéral tourné vers l’offensive, quitte à délaisser quelque peu l’aspect défensif sur lequel l’ancien Munichois s’est tout de même ajusté au fil des années. « J’ai le souvenir d’un joueur plein d’envie, qui n’hésite pas à se projeter vers l’avant », se rémémore Guillaume.
Quatre ans plus tard, Omar Daf acquiesce : « Ce que je voulais, c’était un latéral plus offensif. On a vu les manques dans le couloir gauche au niveau de l’animation offensive. C’était important d’avoir un joueur plus percutant, qui a une bonne première touche, qui percute balle au pied. Dans le dernier tiers, il a une qualité de centre qui peut permettre d’alimenter un peu plus nos attaquants. C’était vraiment important de retrouver un défenseur de ce profil depuis le départ de Kassoum (Ouattara). C’est une bonne chose qu’il soit là, il n’est clairement pas de trop. » Un doux euphémisme pour celui qui est prêté avec option d’achat. Pour s’inscrire dans la durée à l’ASC, il lui faudra prouver et relancer une carrière mouvementée et atypique, à 23 ans.
Enzo PAILOT
Crédits photo : Amiens SC