Entraîneur du club d’Hautvillers-Ouville, ancien membre de la commission technique du district de la Somme et polémiste de l’émission La Tribune de France Bleu Picardie, Bruno Paris délivre son décryptage après chaque match de l’Amiens SC. Ce lundi, retour sur la victoire face à Clermont (1-0), vendredi dernier pour le compte de la 5e journée de Ligue 2.
Bruno, l’Amiens SC a renoué avec la victoire contre Clermont. A juste titre, selon vous ?
Sans hésitation, c’est une victoire méritée. Tu n’obtiens pas ce genre de victoire contre ce genre d’équipe sans déployer des qualités autres que des qualités de footballeurs. Il a fallu une débauche d’énergie qu’on a l’habitude de voir à la Licorne depuis le début de saison. A domicile, l’état d’esprit est le même, les dispositions physiques aussi. Nordine (Kandil) a réussi son premier match à la Licorne. Il a apporté de la justesse technique, de la vivacité, du déplacement. Il n’a pas été facile à contrôler, au-delà de son poste. Son but est très joli. C’est une action construite à droite, avec un relais au centre, une phase finale de préparation à gauche, un centre en première intention et une reprise en une touche. Sur l’ensemble du match, la victoire est méritée. J’ai vu une équipe d’Amiens à la hauteur des promesses faites par Omar Daf. Maintenant, ça renforce le sentiment qu’on a deux visages en fonction des matches à domicile et des matches à l’extérieur.
N’avez-vous pas le sentiment qu’Amiens a un peu joué avec le feu, reculant rapidement après l’ouverture du score. Sans même parler de ce penalty concédé qui a bien failli être le tournant de la rencontre ?
Non, du tout. Je pense que c’est un rapport de forces entre deux techniciens qui ont adapté leur approche. L’entraîneur de Clermont a demandé à son équipe de jouer plus haut, de mettre plus d’intensité, après un début de match tranquille. Cela a logiquement fait un peu reculer le bloc adverse. Cela fait qu’Amiens s’est mis davantage en danger, mais ce n’était pas simplement de son fait. Dans l’ensemble, le projet de jeu était cohérent. C’est dans la lignée des deux premiers matches, avec une réorganisation payante. J’ai trouvé le travail de (Antoine) Leautey dans ce poste de cinquième défenseur, dans la couloir droit, très utile. Amiens avait bien préparé ce match, tout en discrétion, comme l’a précisé Omar Daf. Je pense aussi au choix de titulariser Siaka Bakayoko. J’en avais parlé avant le match dans l’émission La Tribune. J’aime bien prendre un peu de risques, ça m’a réussi, mais ce n’était pas illogique non plus. Il avait été bon contre Lorient et il a encore fait un match très correct, très propre.
Avez-vous été surpris de devoir attendre la fin du temps additionnel pour procéder aux premiers changements offensifs, le tout dans une semaine à trois matches ?
Ce n’est pas vraiment une surprise. Contrairement au match contre Lorient, il n’y avait pas (Frank) Boya ni (Andy) Carroll (parti à Bordeaux, ndlr) sur le banc de touche. Certains se sont échauffés, tout en sachant que les changements seraient faits au compte-gouttes. A part Osaze Urhoghide, qui pouvait faire office de grand-frère du haut de ses 24 ans, il n’y avait que des gamins. Et les faire entrer à un moment où Amiens n’a pas la maîtrise du match… Je pense qu’Omar Daf a bien fait de procéder de la sorte. Ceux qui étaient sur le terrain ne jouaient pas avec le résultat, il n’y avait pas vraiment de raison de changer. Je pense à un Owen Gene, bien meilleur que la semaine dernière à Annecy. Je pense aussi à Rayan Lutin. D’habitude, il semble déjà cuit à la mi-temps, là il a été récupérer des ballons, défendre devant son but jusqu’à la fin. Ce match confirme également la montée en puissance de Rémy Vita, qui a très bien défendu, qui a toujours cherché à ressortir proprement. En plus de cela, il a une vivacité et une condition physique à toute épreuve.
Il va désormais falloir confirmer à Caen dès ce mardi. Comment appréhendez-vous ce deuxième match en quatre jours ?
C’est là que ma confiance perd de son élan. Quand on analyse bien ce match, il y a eu une débauche d’énergie totale. En deuxième mi-temps, on a senti que c’était difficile pour certains qui ont continué à faire illusion grâce à leur qualité technique, je pense à Nordine Kandil. Il a tout donné sur ce match et il va falloir des magiciens au sein du staff technique pour remettre à 100% ce groupe d’ici mardi. Je pense qu’il faudra apporter un peu de sang neuf dans le onze de départ. Cela peut venir d’une titularisation d’Osaze Urhoghide derrière. J’espère surtout que (Sébastien) Corchia et (Kylian) Kaïboue soient en état de jouer pour apporter fraîcheur et stabilité. La saison dernière, avec un groupe plus conséquent, on a souvenir de semaines à trois matches compliquées. On se rappelle de la victoire à domicile contre Saint-Etienne, avant d’aller perdre à Troyes trois jours plus tard en décembre. J’ai peur que ce match laisse des traces et que ce soit compliqué à Caen. A moins que le mental ne l’emporte sur l’état physique, c’est faisable aussi. Pour cela, il faut miser sur l’élan à domicile, la fraîcheur mentale que cela peut amener et transposer cela à l’extérieur.
Bruno Paris estime que la direction doit suivre le mouvement – « Le staff technique a fait son boulot, les joueurs ont fait leur boulot. Maintenant, j’aimerais que ce genre de match réveille les dirigeants. Il faut se rendre compte qu’il manque un joueur ou deux à cette équipe pour offrir encore plus de spectacles et garantir le maintien du club. Pour cela, tout le monde doit y amener sa contribution, sa pierre à l’édifice. Ce match a démontré qu’il manquait encore du nombre à cet effectif pour permettre à Omar Daf d’en faire encore un peu plus cette saison. »
Propos recueillis par Romain PECHON
Crédits photo : Daniel Derajinski/Icon Sport
Très bonne analyse