Alors que l’organisation du déplacement des supporters du VAFC pour la demi-finale de coupe de France à Lyon suscite pas mal de remous, Stéphane B, représentant du groupe des Ultras Roisters, a accepté de faire un point sur la situation, à désormais moins de trois semaines du match. Entretien.
À trois semaines de la demi-finale de Coupe de France contre l’OL. Où en est l’organisation du déplacement ?
Au niveau des ultras, on n’a jamais demandé d’argent public. On se retrouve avec 35 000 euros d’argent public et une polémique à ce sujet. On va se débrouiller. On va très probablement partir de notre côté, parce qu’on ne peut pas partir avec les aides publiques. Ce qu’on demandait à la base, c’est que notre actionnaire (Sport Republic, ndlr) paye grâce aux dotations de la Coupe. On voulait un soutien politique et visible, surtout pour mettre la pression sur la SNCF. Ce qui nous rend fous, c’est qu’on veut être 1 000, mais la SNCF nous propose 140 000 euros pour être 1 000. Les compagnies de bus nous proposent 80 000 euros pour être 1 000. Aujourd’hui, il y a 60 000 euros de différence entre les deux moyens de transport. On nous bassine à longueur de journée sur l’écologie, donc on s’est dit qu’on prenait le train en faisant l’effort pour la planète et l’image. Si on doit choisir au niveau des tarifs, forcément que le bus revient moins cher, et largement.
Notre groupe ne prendra pas les aides, mais s’il faut pousser pour tout le reste du public on le fera. S’il faut qu’on paye notre place au prix coutant mais que le reste du public paye beaucoup moins cher grâce aux aides, pas de problème, on appuie. Nous, on ne veut pas que ce soit le contribuable qui paye notre déplacement. Mais est-ce que le vrai problème n’est pas là ? Est-ce que la SNCF fera un effort pour baisser son prix et plus ou moins s’aligner sur le prix du transport routier ? Il est là le problème. Est-ce qu’on préfère mettre vingt bus sur la route ou n’utiliser qu’un train ? Si on arrive à avoir une solution qui rabaisse le prix du train via le devis de la SNCF qui diminue, ce serait encore mieux. Mais ça commence à faire très tard. Notre bus est bloqué et réservé pour le noyau de notre groupe de supporters – même pas tout le groupe, mais pour ceux qui sont tout le temps là -, parce que notre compagnie nous a posé un ultimatum : “soit vous le prenez maintenant, soit vous ne le prenez pas”.
À combien se chiffre la tarification pour ce bus ?
À 4 500 euros pour 60 personnes, et c’est le moins cher que l’on a trouvé. J’ai vu des devis à 8 000 euros pour la même capacité. C’est fou.
La position des Ultras Roisters de ne surtout pas se déplacer avec l’argent des aides est-elle partagée par les autres groupes de supporters ?
Aucune idée. Elle est arrivée hier soir (mardi soir, ndlr) sans qu’on ne la voit arriver. Il y a eu l’article sur MaLigue2 qui les a, apparemment, un peu chamboulés. Même si c’était dans les tuyaux, ça a accélérer le truc. Je ne sais pas s’il y en a, que ce soit chez les supporters ou au club, qui avaient demandé cet argent. Ce n’est pas ce qu’on leur a demandé. Maintenant, ils le font, pourquoi pas… Honnêtement, il y a débat parce que cet argent public ne peut-il pas servir à autre chose ? Nous, on est dans l’optique de ne pas s’en servir. Et si vraiment on doit s’en servir, ce sera pour le train où on n’aura pas le choix de faire des réservations. Aujourd’hui, l’aller-retour Valenciennes-Lyon en train est à 110 euros. Si la SNCF nous fait une réduction jusqu’à 80 euros, les 30 euros de delta seraient sûrement reversés à une association du Valenciennois qui s’occupe d’un jeune en situation de handicap en galère pour s’acheter un monte-escalier. L’idée, c’est que l’argent public ne nous serve pas à nous déplacer, ce n’est pas dans notre façon de faire. Mais si on doit vraiment le prendre parce que ce n’est techniquement pas possible de faire autrement, on le reverserait directement à une association derrière.
C’est une position qui vous honore…
Oui, mais je ne veux pas cracher sur ceux qui vont prendre cet argent. Même pour les indépendants, parce que beaucoup de familles veulent venir et je comprends qu’à trois ou quatre, ça augmente vite. La région est sponsor du Racing Club de Lens, ils y mettent des millions et des millions chaque année. Ils ont fait des pubs comme pas possible pour le LOSC jusque dans les rues de Valenciennes, ce n’est pas gratuit non plus. Pour une fois qu’ils mettent un peu d’argent et pour réduire un peu l’empreinte carbone, il n’y a pas de souci. Mais le dernier frein reste la SNCF. Si elle s’aligne au prix, pas de problème, on ferait partir un maximum de gens en train.
Vous avez aussi pointé du doigt une tarification pour le grand public moins chère que celle que l’on vous vendez, malgré l’assurance de rentabiliser ce train avec tous les supporters. Cette tarification a-t-elle suscité de l’incompréhension avec les 140 euros de départ ?
C’est ça, même si en TGV classique, on n’est pas loin de ce prix-là. Mais les supporters de foot n’ont pas besoin d’un TGV duplex grand luxe. Il ne faut pas se mentir. Si on nous donne un OuiGo, moi je l’ai pris pour les vacances, il y en a largement assez pour des supporters de foot. On fait juste l’aller-retour, on ne part pas en vacances, on n’aura pas dix mille bagages, il n’y a rien. Un low cost nous irait très bien, et est-ce que ça ne pourrait pas faire descendre ce tarif ? J’imagine qu’il y a encore des discussions. Mais ça parle, ça parle, ça parle et à un moment donné, il va falloir fixer le truc. On est mercredi, le match est dans trois semaines. Si le train ne se fait pas pour X ou Y raison, les compagnies de bus sont de plus en plus compliqués à trouver. Donc finalement, on ne sera pas tant que ça à Lyon. Les gens nous disent : “Merci, mais on a réservé notre train, on a réservé notre hôtel, il est trop tard !”.
Êtes-vous surpris que la mairie de Valenciennes se réveille d’un coup alors que le contact était difficile, ne serait-ce que pour obtenir un dialogue avec eux, et que vous l’appreniez sur les réseaux ?
Oui, on ne sait pas ce qu’il s’est passé. C’est très polémique, surtout entre notre groupe et eux. On a sorti une banderole au dernier match (Angers, ndlr) pour savoir si Degallaix (Laurent Degallaix, maire de Valenciennes, ndlr) savait encore qu’on était là. On l’a un peu titillé dans l’article chez vos confrères de MaLigue2. Il sort ça sur les réseaux, on se rend aussi compte qu’il a bloqué notre groupe sur les réseaux sociaux, il doit être un peu vexé. On pense que la région a fait le taf et que, derrière, l’agglomération s’est limite sentie obliger de le faire. Mais peut-être que ce n’est pas ça. C’est bizarre de leur part de se vexer, de nous bloquer, de ne pas nous parler. Mais s’il faut juste qu’on soit bloqué pour avoir une aide financière et surtout morale, ce n’est pas grave, on se sacrifie sans souci.
La réunion de lundi avec le club sur toutes les modalités de déplacement (prise en charge des places, navettes…) a visiblement été un peu houleuse. A-t-elle un peu terni vos relations avec le VAFC ?
J’ai envie de dire oui et non. Avec nos interlocuteurs actuels, non, parce que François Launay (ndlr : directeur de la communication) et Yoann Godin (ndlr : directeur général) sont des gens que l’on apprécie et qui sont amoureux du club. Ce n’est pas eux qui ont le chéquier. Le souci qu’on a, c’est au-dessus avec les vrais patrons. Il n’y a pas de son pas d’image. À la qualification, on n’a vu aucun communiqué de Sport Republic pour s’en féliciter. Pour ce déplacement, on ne les entend pas dire quoi que ce soit. Au niveau sportif et pour la descente en National, ils sont aux abonnés absents. C’est ce qui nous fait penser qu’ils sont fantômes. On aimerait bien les entendre parler sur ça, qu’ils donnent leur avis et qu’ils se bougent. Avec les dirigeants valenciennois du VAFC, on n’a aucun souci avec eux, ça se passe encore bien et il y a encore des discussions. Au-dessus, ça commence à être problématique.
Les arguments se basant sur l’injection de 22 millions d’euros dans les caisses du club ou la prise en charge de 75% du déplacement à Rouen, les entendez-vous ou ce n’est pas audible ?
On n’oublie pas ce qu’ils ont fait et ce qu’ils feront encore pour passer la DNCG cet été. On ne mélange pas tout. Mais justement, on ne demandait pas leur argent mais celui des dotations de la Fédération Française de Football (avec la Coupe de France, ndlr). C’est de l’argent qui est un peu arrivé par miracle, qui n’était pas prévu dans les lignes budgétaires. Aujourd’hui, on nous dit que ça va surtout servir pour doubler ou tripler les primes de victoire à Saint-Priest ou à Sarreguemines… On a juste gagné contre une N2 ou une N3. Nous aussi, je pense qu’on méritait cette petite prime de qualification. Maintenant, on ne nie pas non plus l’aide logistique apportée par le club.
À trois semaines du déplacement, y a-t-il quand même de l’optimisme qui règne pour remplir ce parcage de 1 500 personnes à Décines ?
En semaine, je pense que ce sera quand même compliqué. Mais on voit quand même que des gens s’organisent déjà de leur côté. C’est très rare d’avoir des supporters à Valenciennes en pleine semaine. Il y a des gens qui ont déjà réservé leur hôtel et leur train, qui ont déjà prévu d’y aller en voiture. Il y a beaucoup d’“expatriés” qui habitent un peu partout en France et qui veulent y aller, même s’ils n’ont toujours pas d’infos du club. On a toujours cette capacité à faire une dizaine de bus s’il le faut et cet espoir qu’il reste possible de faire partir 1 000 personnes en train. Historiquement, ça aurait de la gueule. On se dit : “Putain (sic), 1 000 personnes en gare de Valenciennes mais surtout en gare de Lyon, en train de chanter pour fêter la victoire, ça peut vraiment avoir de la gueule”. C’est pour ça qu’on ne lâche rien et que d’autres supporters ne lâchent rien pour que ça se fasse.
Propos recueillis par Romain PECHON et Enzo PAILOT
Le VAFC insiste sur l’existence du dialogue avec les supporters
A l’occasion d’un communiqué publié sur son site officiel, le VAFC a fait savoir qu’il « continue de travailler avec les groupes de supporters et les différentes compagnies de transport pour trouver la solution et les tarifs les mieux adaptés. » Selon nos informations, le club – qui se félicite que les collectivités locales se mobilisent pour aider les supporters – continue d’oeuvrer auprès des compagnies de bus pour trouver la solution la moins onéreuse possible.
Le VAFC va également prendre en charge la totalité du billet (14 euros par personne), après avoir participé à hauteur de 75% du billet au tour précédent à Rouen, et le coût des potentielles navettes entre la gare et le stade à Lyon. Une somme qui n’entre pas dans le chiffrage initial des 140 000 euros souvent mis en avant par les supporters, celui-ci concernant uniquement le trajet par le biais de la SNCF. Sur ce dernier point, le club est fermé à l’idée d’apporter un soutien financier, tout en rappelant que ce train pouvait être affrété grâce à l’engagement du club.
Crédits photo : Iconsport